jeudi 3 décembre 2009

Danse du ventre

Ça c´est un post spécialement dédié aux amies actuellement enceintes ! (elles se reconnaîtront :-) ).
Mais c´est aussi pour illustrer différents articles où j´évoque la fameuse "danse du ventre". Indications : Allongez-vous. Respirez tranquillement - Laissez l´enfant en vous s´exprimer librement...!
Cette danse date du 30 octobre 2008, quelques jours avant la naissance de Solenn.

Solenn aime toujours autant danser d´ailleurs. A voir si je peux vous montrer bientôt...

lundi 30 novembre 2009

Solenn et Ariadna : un an et quelques dents...

Cette fois, quelques photos...Elles sont toutes de Sergi Bernal et jalonnent un an de rencontres "au sommet" entre Solenn et Ariadna.






Approchant des deux mois...décembre 2008 ou janvier 2009 ?








Parc de la Ciutadella, fin avril - Fira de la Terra. Fin avril 2009.


Courant 2004 - Jaume, étudiant de Guénola dit à celle-ci : "J´ai une amie qui revient de Chine comme toi, faut absolument que je te la présente, je suis sûr que vous vous entendrez bien !" Les présentations eurent lieu, une amitié naquit, en juillet 2006 la cohabitation commença, fin octobre de cette même année Eli s´envola de nouveau en Chine puis elle revint en septembre 2007, en janvier 2008 pendant un séjour en Argentine où elle accompagnait un groupe comme guide, Eli s´aperçut qu´elle était enceinte, en mars 2008 pendant un séjour au Mali où elle allait revoir des amis, Guénola s´aperçut qu´elle était enceinte, les deux amies partagèrent appart et grossesse ensemble jusqu´en juin-juillet 2008 puis elles enfantèrent à 15 jours d´intervalle à l´automne et, naturellement, échangèrent encore plein de choses de filles...

Jaume (l´étudiant-ami-présentateur), entre temps, n´a pas chômé lui non plus car il a eu avec sa compagne Mirene deux adorables filles (Irate et Yoné) et est aussi devenu l´adorable prêteur-fournisseur de petites fringues pour les petites, siège auto etc. Un ami en or !





Mobilité :
à 6 mois, Ariadna maîtrise le clignement d´oeil et la préhension des doigts à la perfection !








Anniversaire de Sergi, juillet 2009.


En juillet chez les parents d´Eli pour les 36 ans de Sergi. Ou 35. Jaume, Mirene et leurs filles étaient là aussi. Mais tout le monde n´a pas eu le courage de se plonger dans l´eau fraîche de la piscine en fin d´après-midi ! Les pitchounes, elles, ont adoré.














Festival Gong à Collbato, fin juillet 2009.


















Solenn, au profil très "mafaldien" sur cette photo, s´entraîne à faire résonner le bol tibétain.

Ariadna, elle, préfère faire vibrer les fils électriques en les mordant avec ses petites dents.

(le festival GONG a lieu chaque année dans les caves de Salnitre à Collbató, au mois de juillet. Il s´agit d´un festival musical explorant les "nouvelles sonorités". Avec Eli, Sergi et David, nous avions été faire une promenade musicale dans les grottes pendant que Solenn et Ariadna, ne pouvant descendre avec nous dans ces cavités profondes et glacées, ont fait résonner leurs nouvelles sonorités dans les oreilles de Carmen.



Après une visite chez le pédiatre, début août 2009.



Solenn et Ariadna semblent intriguées par la glace que mange David...

Début août, carrer de la M
erce (là où j´habitais entre 2006 et 2008 avec Eli - et, pendant son séjour asiatique, avec

Marta et le petit Tiago, mais aussi Jorge puis Francesca) et là où Eli vit toujours avec Sergi et Ariadna. De fait, le 46 est le repaire des soeurs Soler (Laia au 1er, Mariona au 3ème, Eli au 4ème, il ne manque qu´Anna !).


Après la remise de courrier rituelle, nous étions allés prendre un pot dans le quartier. Les filles jouent sur la table du café en terrasse puis sont posées à terre (là même où elles avaient jeté le contenu de la table).








Septembre 2009, "baptême" néo-bouddhiste.









Eli, Sergi et Ariadna étaient bien entendu de la partie...








25 octobre, anniversaire d´Ariadna : un an !

La fête eut lieu au Parc de la Ciutadella avec plein d´amis. Quelques semaines plus tard, le trio nous a rejoint al Bruc pour fêter cette fois l´anniversaire de Solenn. Les deux compères ne loupent plus une occasion pour faire la fête !

vendredi 27 novembre 2009

Un classique : les premiers pas

L´avantage de ce "journal en ligne", c´est que lorsque l´on sauvegarde un brouillon, ça garde la date et c´est celle qui est éditée ensuite, même quand on a repris le texte et qu´on l´a terminé plus tard.

Comme ça, on a l´air ponctuel. Je parle du texte précédent qui n´était pas du tout "bouclé" pour les un an de Solenn le 06 novembre.

Cette vidéo date elle aussi (réellement) du 06 novembre. C´était un vendredi et pendant la semaine, dans le café où l´on va se réchauffer quand je vais la chercher, Solenn s´était lancé timidement, 2-3 pas et puis hop elle repassait aux 4 pattes. Elle se levait, s´accroupissait, tenait debout sans soutien et on la sentait tentée par moments d´avancer mais c´est une enfant prudente. Elle apprivoisait l´équilibre avant d´être sûre qu´elle serait capable de le faire. Comme pour le 4 pattes où elle s´est assurée, le mois précédent, qu´elle était bien stable sur ses deux bras et ses deux jambes.

Donc depuis mi-août elle se mettait debout et esquissait des pas, et marchait quand on la tenait des deux mains, puis d´une main, de deux doigts, d´un doigt. Les amis nous disaient "ouh là là ça y est, dans un mois elle marche !" mais c´était mal connaître Solenn qui parfait avec le temps la maîtrise de son petit corps curieux de l´espace. Elle a donc consolidé pendant 2 mois et demis cet apprentissage qui la fait passer du petit chat au petit d´homme.

Et elle a choisi le jour de son anniversaire pour se lancer complètement et marcher seule. Ça, c´est parfait, pour répondre, plus tard, à la question "elle a marché quand ?" Ce n´est pas la première fois que j´observe cette coïncidence entre le passage à l´acte et l´anniversaire d´un tout petit. Il y a peut-être quelque chose qui se joue, ou se rejoue, biologiquement, inconsciemment, à travers le corps sorti à la lumière un an avant, ces deux corps soudain séparés, celui de la mère et celui de l´enfant, puis une nouvelle étape marquante donc, pour passer d´un état à l´autre et continuer sur le chemin de cette entrée au monde.

Voici, donc, si vous ne craignez pas d´avoir le cou un peu tordu l´image de ces "premiers pas". Mon frère Yul pourra se moquer de mes tentatives avec la vidéo, Blogger n´en fait qu´à sa tête, me bloque parfois l´édition en cours ou désordonne totalement mes textes. C´est très énervant (voir l´article précédent, à la fin, mes paragraphes étaient très bien découpés et il a tout recompilé, juxtaposé. What are you blogging mister Google ?

vendredi 6 novembre 2009

Chronique d´une nuit belle et mouvementée


Il y a un an, jour pour jour, Solenn est née. Ou : Solenn naissait. Ou bien : Solenn naquit. Ou encore : Solenn était en train de naître...

Hmm...C´est intéressant de se poser la question de la conjugaison à choisir pour ce "temps-là" : naît-on quand on sort - schloupppp... ou naît-on pendant toute cette danse où l´on sort vers la lumière ? "

Danse" : belle, intense, tournoyante mais qui donne de sacrées crampes ! Danse initiatique en quelque sorte.

Mais évidemment je ne vais pas parler grammaire dans ce texte. De fait, il n´y avait plus de syntaxe qui tienne la route cette nuit-là. Je veux juste rassembler des mots pour faire écho au souvenir, égréner des notes de musique pour danser cette valse. Un petit texte d´anniversaire à la mode de Perec pour célébrer ce premier anniversaire.

Comment ça s´est passé déjà ? Ah oui, ça y est, ça me revient. "Je me souviens"...


Je me souviens que la veille, pendant la journée, j´avais déplacé tous les meubles du salon de Can Perellong pour tester une nouvelle disposition : canapé, table basse, télé, chaîne hi-fi et magnétos, des noeuds et des noeuds de fils électriques derrière, des tas et des tas de poussière vieille de plusieurs années dans tous les recoins. Du coup, j´avais dû balayer, de surcroît. Puis, la nouvelle disposition (le salon inversé) ne m´avait pas plu. A David non plus. J´avais donc tout refait en sens inverse : quand je remettais en place, fils noués et appareils débranchés, des choses lourdes ou encombrantes, je me souvenais du diagnostique du gynécologue des urgences vu 3 semaines avant : "repos absolu !". Pourtant, cette opération faite et refaite (qui n´aura eu de changement que le ménage donc), je me suis mise à monter un meuble Ikéa : une sorte de "table à langer". Je sentais que ça tiraillait en moi, que j´en faisais sans-doute trop, que j´arrivais à peine à me baisser pour nouer mes lacets mais j´étais toute excitée par le mouvement de l´action. Je me disais : "ça doit être ça la frénésie ménagère de la femme ultra-enceinte". Le soir tombant, un marteau encore entre les mains, j´avais regardé l´heure et avait filé au yoga. Ma professeure Estrella ("Etoile") nous guidait dans les postures ou la méditation- relaxation pendant qu´en moi, le bébé en profitait pour bouger dans tous les sens. Ce n´était pas très reposant.

Je me souviens que cette nuit-là, la nuit du 4 au 5 novembre, nous avions dormi pour la première fois dans la maison del Bruc. Nous nous étions couchés tard, vers 2 ou 3 heures du matin. Le vieux lit en bois, les poutres et l´alcôve donnaient un air d´antan, une intimité chaleureuse.

Je me souviens que dans la journée du 5, nous avions rendez-vous chez le Dr Serra, gynécologue à la Dexeus. Il avait un côté très tendre, pour un médecin. Quand il venait m´ausculter, il me saluait en me passant très légèrement la main sur la joue ou en m´effleurant le genou. Il m´avait dit : "bien, le bébé est maintenant tout-à-fait placé, très bas, vous êtes à 2 centimètres". Gloups.

Je me souviens de son sourire quand je lui ai demandé : "Et le col, il est à combien de centimètres lui ?". Il avait alors répondu : "le col ? Mais il est complètement effacé !" Je me souviens de mon désarroi complet. Une voix intérieure me soufflait : "Mais alors, c´est éminent !"

Je me souviens m´être sentie tout-à-fait déboussolée quand il avait cependant ajouté : "Mais ça ne veut pas dire que c´est pour demain, ça peut aussi tarder un peu plus ". Puis se tournant vers David : "Enfin cette fois je vous recommanderai de rester par ici et de n´aller ni à Madrid ni à Girone !" Le bébé était prévu aux alentours du 17 novembre mais depuis le 10 octobre il y avait eu quelques signes précurseurs d´anticipation. Pour me troubler davantage, le docteur avait fixé une date pour la semaine suivante, au cas où.

Je me souviens que David n´avait pas du tout l´air de comprendre ce qui se passait.

Je me souviens qu´en sortant de la clinique, j´étais tout-à-fait perplexe : le col effacé, les 2 centimètres, les contractions que j´avais senties les jours précédents au cinéma, la tête du bébé toute descendue... Mais malgré tout cela, je me souviens que nous sommes allés à Ikéa, pour compléter le mobilier enfant ou acheter une bibliothèque pour la masia.

Ça, en fait, je ne m´en souviens plus (ce qu´on allait y chercher).

Mais je me souviens qu´à la fin de cette expédition, je me sentais extrêmement fatiguée et très "embarassée"* par mon ventre vraiment très rond.

Je me souviens que ce soir-là je devais dormir chez Ingrid et Rodrigo pendant que David sortirait. Cette idée ne me réjouissait pas. Je me disais : "Il ne se rend pas compte ou quoi ?" Je me souviens me sentir si fatiguée que j´en étais déprimée et que j´avais presque envie de pleurer.

Je me souviens qu´une fois dans la voiture, j´avais dit à David que je ne me sentais pas la force d´attendre qu´Ingrid et Rodrigo rentrent chez eux. Je me souviens qu´il n´avait pas l´air très coopérant au début. Puis, à contrecoeur, il avait dit : "bon alors on rentre à Can Perellong".

Je me souviens que je me demandais s´il était possible de rester dans cet état une semaine de plus.

Je me souviens que, tout-à-coup, je me suis sentie très énervée. Nous avions fait une partie du trajet et je pense que David devait manifester un certain regret à ne pas sortir et, par là même, une certaine incompréhension face à mon état.

J´ai piqué une colère noire, sans qu´aucun signe ne laisse présager ce changement de comportement soudain et je me souviens avoir crié quelque chose dans le genre : "Fais demi-tour ! Laisse moi à Barcelone, je veux aller dormir à côté de l´hôpital, et puis t´as qu´à sortir si tu t´rends pas compte ! Mais laisse-moi, laisse-moi, laisse-moi, je veux pas aller à Collbató, j´irai accoucher à pied s´il le faut !"

Je me souviens qu´en entendant le son de ma voix, je pensais : "C´est moi ça ?"

Je me souviens que David avait l´air confus et répétait : "amorcito, calmate, vamos a Collbató, relajate..."
("p´tit amour, calme-toi, on va à Collbató, relaxe-toi !"
)

Et je me souviens que je répétais : "Non, non, non !"

Je me souviens que j´entendais David penser : "Mon Dieu, ces hormones de femme enceinte !"

Je me souviens que j´étais tellement hors de moi que j´ai fini par me dire qu´il serait sans-doute mieux, dans de pareilles crises d´hystérie, que le bébé le soit aussi, hors de moi.

Je me souviens d´un professeur qui nous avait dit que le mot "hystérie" venait d´"utérus".

Je me souviens que, malgré cela, tout s´était apaisé une fois rentrés à la maison et que nous avions dîné très sereinement. Je me souviens que nous nous étions couchés vers 23h30. J´étais épuisée. A côté de moi, David lisait le journal.

Je me souviens avoir fermé les yeux et me sentir tomber délicieusement dans le sommeil.

Je me souviens la vibration aigue et pénétrante qui traversa mon corps quelques minutes après.

J´ai ouvert les yeux.

Je me souviens avoir regardé silencieusement David en écoutant mon corps.

Je me souviens avoir commencé à sentir "l´eau" couler entre mes jambes. D´ailleurs on dit “les eaux”. Singulières eaux plurielles...

Je me souviens avoir pensé "C´est ça".

J´ai pourtant décidé d´attendre encore et j´ai continué à regarder David sans rien dire.

Je me souviens sentir le rythme des coups frappant en moi aux portes de la vie.

Je me souviens que David ne se doutait absolument de rien et fronçait les sourcils en lisant un article.

Je me souviens m´être décidée à lui dire : "Cariño, je crois qu´il va falloir y aller."

Je me souviens de son air surpris et de sa question : "Aller où ?"

Je me souviens avoir répondu "bah à l´hôpital. Regarde là, touche les draps !"

Je me souviens que David restait très sceptique, malgré tout cela. Nous nous sommes cependant levés.

Je me souviens qu´en me rhabillant, je me sentais parfaitement sereine, avec cette pointe d´excitation qui précède les moments où l´on sait "qu´il va se passer quelque chose".

Je me souviens que David avait encore demandé : "Mais tu es sûre qu´on doit y aller ?"

Je me souviens lui sourire et prendre quelques coussins pour la voiture. "Au cas où ça arrive en route".


Je me souviens de l´atmosphère ouatée de la nuit pendant le trajet, le peu de voitures qui circulaient, de sensations très douces : je respirais profondément et je trouvais les contractions très agréables. Je me disais : "oh bah ça va, si ça reste comme ça !"

Je me souviens que je planais tellement que David était de plus en plus incrédule, au point de dire en arrivant près de l´Hospital del Mar : "Moi je ne crois pas que ce soit pour cette nuit !"

Je me souviens que les infirmières ont eu le même type de réaction en me voyant : "Mais vous êtes sûre que vous avez perdu les eaux ? et que vous sentez des contractions ?"

Je me souviens m´être gardé de leur parler des 2 centimètres, du col et d´être toujours aussi calme et sereine en montant sur leur bidule d´auscultation.

Je me souviens de l´exclamation de la gynécologue de garde en s´adressant plus à sa collègue qu´à moi : "Ouh là oui en effet, je vois les cheveux !!!"

Je me souviens qu´on m´a fait mettre mes habits dans un grand sac poubelle et qu´on m´a passé une sorte de blouse blanche qui se nouait derrière.

David attendait dans la salle d´attente. J´avais hâte qu´on aille lui dire que c´était bel et bien pour cette nuit, qu´il fallait arrêter de jouer à monsieur-je-sais-tout-même-sur-les-eaux-et-les-contractions.

Je me souviens ne pas être contente du tout quand j´ai vu qu´on me mettait une aiguille dans le bras connectée à un machin ambulant, en m´expliquant : "vous ne pouvez plus rien boire à présent".

Je me souviens que je n´ai jamais eu aussi soif que cette nuit-là.

Je me souviens que le lendemain j´avais rendez-vous avec Jesus qui devait me prêter son balladeur pour écouter des mantras pendant l´accouchement. Je me souviens m´être dit : "c´est trop tard, dommage..."



Je me souviens que ça se corsait, au niveau des contractions.


Mais je restais calme, silencieuse, très concentrée sur mes respirations, comme j´avais appris avec mes professeurs successifs de yoga. Je me souviens qu´on m´a passé les trucs autour du ventre pour écouter les pulsations du coeur du bébé et enregistrer les contractions. On voyait les deux courbes sur un petit écran à ma droite et de cette machine sortait une feuille avec les "graphiques". J´ai retrouvé plus tard cette feuille et elle m´a renseignée sur les heures : l´enregistrement avait commencé à 1h34 et 46 secondes et se terminait vers 3h40. Plus de deux heures à suivre toutes ces vibrations !


Je me souviens qu´une fois là, David était ému et suivait très attentivement le cours des courbes. Je lui disais parfois : "non ne me dis rien, je sens" mais quand je voyais son sourire se crisper, je savais qu´arrivait une ascension vertigineuse.

Je me souviens que tout-à-coup, le rythme du coeur du bébé semble s´être affolé. Il y eut un bruit strident, comme une alarme, puis la machine s´est brutalement arrêtée – l´enregistrement de la courbe en tout cas. David s´est inquiété et est allé chercher des infirmières qui ont prononcé le mot “tachycardie”. David était tout-à-fait paniqué à ce moment-là.

Moi, pas du tout.

Je ne croyais pas à ce diagnostique hâtif. Le bébé avait toujours eu le coeur qui battait la chamade et je me disais juste : “un petit peu plus d´émotion, c´est normal, c´est pas tous les jours qu´on naît.”

Je me souviens qu´un peu plus tard, le gynécologue m´aura donné raison et aura su apaiser David. “Mais non, il ne s´agit pas du tout de tachycardie, tout va bien, elle est magnifique cette courbe”.

Je me souviens que ce fut le début des compliments-du-médecin-sur-ma-courbe-qui-n´allait-pas-toujours-être-de-mon-goût. On aurait dit qu´il commentait les passes et les buts d´un match du Barça : “Magnifiiique ! Parfait ! J´en voudrais plus souvent des courbes comme ça !”

Je me souviens qu´avec le ventre aussi proéminent, il n´y avait aucune ambiguïté sur la nature des courbes félicitées. Il s´agissait bien de celles qu´enregistrait mécaniquement la petite machine hi-tech.

Je me souviens qu´il y avait un problème de lit et de berceau, il n´y en avait plus de libre : j´avais entendu les infirmières en parler quand elles m´auscultaient. Je savais ce que cela voulait dire mais je ne voulais pas y penser.

Je me souviens que lorsque le thème a été évoqué devant David, il n´a pas du tout aimé. Il se scandalisait : « Mais enfin ce n´est pas possible, elle a été suivie dans cet hôpital, et puis les analyses et puis c´est quand-même incroyable, vous voyez pas qu´elle est en train d´accoucher ! »

Ils voyaient très bien, ils n´étaient pas nés de la dernière pluie et puis c´était leur métier.

Je me souviens du stress que cela semblait provoquer autour de moi mais j´écartais cette question. J´étais à l´intérieur de mon corps. Parfois me traversait cette pensée que j´avais lue : une femme en train d´accoucher ne doit pas « raisonner », être dans le mental. Je me demandais s´ils en avaient conscience et s´ils ne pouvaient pas me laisser tranquille.

Je me souviens que les choses ne semblaient pourtant pas s´arranger. On énumérait les hôpitaux où on pourrait m´envoyer : San Pau, Vall d´Hebron, Clinic, un autre. Je ne les connaissais pas mais je savais qu´au Vall d´Hebron, les chambres se partageaient avec 4 femmes au lieu de 2, ce qui n´avait rien d´alléchant.

Je me souviens qu´en le commentant à David, il se braqua et, ponctué de plusieurs insultes à l´égard du système sanitaire public, son discours se résumait à : “On va à la Dexeus*”.

Je me souviens lui dire : “Non, David, t´es complètement fou, on va pas à la Dexeus !”

Je me souviens de son insistance, de sa détermination. “Ce n´est pas tous les jours qu´on accouche”.


Heureusement.

Je me souviens que les infirmiers lui expliquaient “calmez-vous, d´abord on va l´ausculter pour savoir où elle en est et puis si vous allez à la Dexeus, d´accord, mais comme c´est une clinique privée, on ne peut pas fournir l´ambulance publique. On peut appeler une privée mais il vous faudra la payer.”

Je me souviens que David redoubla de mots doux pour le système.

Je me souviens que j´étais à 4-5 centimètres mais qu´ils étaient prêts néanmoins à me transférer à un autre hôpital au milieu de la nuit.

Je me souviens que les contractions étaient vraiment fortes et que ça m´épuisait de penser que j´allais devoir traverser Barcelone dans une ambulance.

Je me souviens qu´un infirmier nous avait communiqué avec un air contrarié qu´il n´y avait aucune ambulance privée disponible avant une heure minimum.

Je me souviens des paroles de David : “C´est pas croyable. Allez, hop, on s´en fout, on va à la Dexeus en voiture!"

Je me souviens lui avoir dit : “Non, il en est hors de question. Je ne monte dans aucune voiture.”

Je me souviens de l´embarras des infirmiers, de leurs regards de connivence, des mots qu´ils se disaient à mi-voix, pour finalement annoncer quelques minutes plus tard : “bon écoutez, on va s´arranger. Si ça vous dérange pas de rester dans une salle de dilatation des urgences le temps que se libèrera un lit en bas demain, vous pouvez rester.”

Je me souviens avoir soupiré “ouf, enfin !” et que David m´avait regardée en demandant : “tu es sûre, c´est bien ?”. Bien-sûr que c´était bien, moi j´étais prête à rester au service des jambes cassées s´il le fallait, du moment qu´on me fiche enfin la paix.

Je me souviens de la violence de plus en plus accrue des contractions.

Je ne me souviens plus trop bien de la suite, à vrai dire. En tout cas, de sa chronologie. C´est tout flou.

En vrac : je me souviens que le gynécologue passait de temps en temps et s´écriait : “Qu´elle est belle, mais qu´elle est belle cette courbe ! Bravo ! Félicitations !”

Je me souviens avoir pensé : “P.... mais il peut pas se la fermer lui !”

Je me souviens avoir demandé à aller aux toilettes, m´être vue dans la glace : bouche sèche, pâleur d´une nuit sans sommeil, cernes bleues. Et surtout m´être dit : “Ah non mais là c´est pas possible, le bébé va tomber”. Ça me lançait dans les jambes de façon incroyable, je le sentais si bas le bébé, si prêt à glisser de mes cuisses et puis ces contractions qui ne me laissaient quasiment plus reprendre mon souffle.

Je ne me souviens pas avoir eu aussi mal, jamais. Ressentir ces douleurs si aigues, ne pas avoir le temps de s´en remettre. J´avais l´impression que l´Etna était en moi, en ébullition, et que le volcan déclenchait en même temps 3 séismes degré 8 ou 9 sur l´échelle de Richter.

Je me souviens qu´en revenant des toilettes où j´avais à peine osé faire pipi, j´essayais de rester debout à côté du lit pour voir si je supportais mieux comme ça.

Mais la contraction revenait, brutale, soudaine, tempestive. Je me tordais en deux, gémissant en silence. Je perdais mon souffle, je ne contrôlais plus rien.

Je me souviens que David me regardait en me suppliant des yeux : “Tiens bon !”

Je me recouchais sur le lit, épuisée et je n´avais le temps de rien, la contraction revenait, plus longue, plus intense, plus terrible que la précédente. Je me contrôlais pour ne pas crier, je me tordais, tordais, tordais en hâletant, j´avais terriblement soif et terriblement mal et je ne voulais pas faire de bruit. La voisine n´accouchait pas elle, ça devait l´impressionner.

Je me souviens que David me prenait la main, me la serrait, me caressait doucement le bras. Je pressais ses doigts, serrais les dents et me débattais en donnant des coups de pied contre la barre de fer au pied du lit quand de nouveau, une flamme me traversait. Il me disait “calme toi, calme toi !”, c´était sa propre peur qui parlait, la conscience de sa distance entre son corps paisible et le mien en pleine tourmente.

Je me souviens que je pensais à notre enfant dans cette bourrasque, cette tempête de mer, cet orage. Je me demandais ce qu´il sentait, ce qu´il ressentait, notre tout petit. Je lui murmurais “ne t´inquiète pas, ça va passer, ne t´inquiète pas, je suis là, ça va finir...”

Je me souviens que je me demandais si ça allait finir un jour, effectivement.

Je pensais à mes deux grands-mères qui, chacune, avaient eu 10 enfants, chez elles, dans la ferme familiale. Sur une cadence de 2-3 ans à peu près. Je les trouvais héroïques, me demandais comment elles avaient fait, ce que l´on ressent au 9ème, au 10 ème. Je ne pouvais même pas imaginer, à ce moment-là, pouvoir revivre cela ne serait-ce qu´une deuxième fois.

Je me souviens qu´il n´y avait plus aucun répit d´une contraction à l´autre, je ne distinguais plus la fin d´une et le commencement d´une autre.

Je me souviens que j´étais si fatiguée, si faible que j´étais dans un degré abstrait de conscience, je plongeais parfois dans une sorte de sommeil profond, aussitôt réveillée par la douleur et l´acuité d´une nouvelle crampe.

Je me souviens des mots de David : “Cariño, sabes, eso de los partos naturales, no sé...igual no és el lugar, sufririas menos con l´epidural” (“Chérie, tu sais, ton histoire d´accouchement naturel là...c´est peut-être pas le lieu, franchement tu devrais demander la péridurale”).

Je me souviens ne pas vouloir me rendre, penser aux mantras que je ne pouvais pas écouter, aux respirations que je ne contrôlais plus du tout et, soudain, m´entendre dire : “T´as raison, j´en peux plus, ça fait trop mal, va chercher le gynéco-des-courbes-fantastiques et dis lui que je me rends, qu´il me fasse une péridurale sur le champ”.

Je me souviens que ce n´était pas aussi simple que cela.

Je ne me souviens plus combien de temps j´ai dû attendre pour qu´on s´occupe de moi mais que ça m´a semblé une éternité.

Je crois me souvenir que David sortait parfois fumer et, peut-être, était-il allé manger un peu à un moment donné. Je l´enviais de pouvoir boire, j´avais terriblement envie de transgresser cet interdit. J´essayais parfois d´interpeller une infirmière "c´est sûr on peut pas boire ?" et elle me confirmait, en inclinant la tête. Je me résignais.

Je me souviens que tout mon corps était secoué, il se tétanisait, se cabrait. Un poids, une pression, une décharge électrique lançait ses flèches dans mes jambes, je pensais à toutes les femmes du monde qui accouchent tous les jours, toutes les nuits, partout dans le monde et je m´accrochais à cette immense communauté, éternelle et sublime.

Je pensais aussi au fait qu´il était plutôt rare, de nos jours, de “mourir en couches”. Mais je comprenais que ça puisse avoir lieu. Je me gardais bien de partager mes pensées avec David. De fait, je n´avais ni le courage ni le temps de parler : je pouvais à peine respirer.

Je me souviens qu´une femme, cette nuit-là, avait accouché avant moi dans ce même hôpital (le dernier lit !). On lui avait pratiqué une césarienne. Je ne tenais pas du tout à aller au bloc opératoire. Je pensais “Va pour la péridurale à la limite mais qu´on ne me cisaille pas le ventre !”

Je me souviens m´accrocher à une pensée qui me rassurait : ce ne sont que quelques heures dans une vie, il faut relativiser. Ce n´est pas grand-chose. Ça va passer.

Je me souviens que ce "pas grand chose" était tout-de-même quelque chose.

Je me souviens que l´équipe médicale avait tout-à-fait disparu et que je me sentais livrée à mon sort. J´envoyais David en éclaireur en lui disant : “mets la main sur le gynéco. Dis lui de pas me laisser comme ça, il se rend pas compte, c´est un homme, vous vous rendez pas compte vous les hommes, mais c´est pas possible, pourquoi c´est vous qui vous occupez de nous dans ces cas-là alors que vous ne pouvez pas comprendre !”

Je me souviens que, chassant d´un coup principes naturels, préparation yogi et méditation supra-sensorielle, j´aurais supplié à genoux et donné corps et âme pour qu´on m´administre enfin cette satanée péridurale.

Je me souviens qu´une infirmière est enfin venue et m´a dit ces mots magiques : “on va passer dans la salle d´accouchement”. Une femme, enfin, avec ce sourire, cette douceur, cette complicité rassurante.

Je suis arrivée dans la salle d´accouchement avec ces appareils un peu inquiétants comme on entre dans une salle de bal. Prête pour la valse. Mais j´avais toujours le souffle coupé de contractions hallucinantes, vertigineuses.

Une fois sur la “table”, assise, on me dit de courber le dos et de ne pas bouger. Une infirmière m´immobilisait et je pensais “mais c´est impossible de ne pas bouger, ils font ça tous les jours et ils ne se rendent pas compte que c´est comme demander à une puce de ne pas sauter.”

Je me souviens avoir agrippé les poignets de la sage femme et de lui avoir dit, dans un souffle : “non mais là c´est normal de sentir autant de pression dans les jambes ? Je meurs d´envie de pousser.” C´est la phrase que je n´osais pas prononcer depuis un moment. C´est terrible cette sorte de timidité que j´ai face à la trivialité. “J´ai envie de pousser” est une phrase si entendue, si caricaturale, qu´on ose à peine la dire.

Je me souviens que, faisant un signe à l´anesthésiste pour qu´il ne fasse passer qu´une dose très légère, elle me dit : “ah bon, mais alors attendez, on va vous ausculter tout de suite”.

Je me souviens de son cri d´étonnement et de son verdict : “ah bah oui en effet il ne vous manque qu´une ou deux secondes pour être à 10”.

Je me souviens m´être dit : “c´était bien la peine de me faire attendre ! et puis c´est n´importe quoi la péridurale maintenant, ça ne sert à rien !” En fait je n´en pensais pas moins, ça calmait déjà les contractions, j´aurais pris quoi que ce soit pour arrêter ces tiraillements et ces rouleaux de mer agitée en moi, se claquant brutalement contre les parois de mon corps.

Je me souviens que la sage femme avait ajouté : “ah zut le bébé a la tête du mauvais côté, il devrait regarder vers le bas en sortant et actuellement il regarde vers le haut. Vous allez vous allonger sur le côté et avec un peu de chance, il va se replacer.”

Je me souviens que David, dans un premier temps, n´avait pas pu entrer avec moi. L´ambiance était très détendue dans cette salle où tout allait se jouer : l´anesthésiste parlait de choses quotidiennes, de sa copine qui travaillait aussi dans un hôpital, de leurs horaires. Les infirmières compatissaient, parlaient aussi de leur vie. On n´aurait presque eu envie de s´asseoir autour d´une table et de prendre un café s´il n´y avait pas eu cette fille, là, sur la table d´accouchement, en plein travail.


Cette fille, c´était donc moi et j´étais sur le point de me dédoubler. De laisser sortir le petit être qui m´avait tenu compagnie durant ces longs mois et dont la présence avait été complice, rieuse, mystérieuse, magique. Je m´étais toujours sentie en osmose avec ma petite clandestine à bord. Même dans cette galère, on était toutes les deux embarquées sur le même bateau, on ferait face jusqu´au bout à cette tempête où tout chavire. Surtout notre coeur.

Je me souviens que, sur ces faits, David entra. Je n´ai pas pu m´empêcher d´éclater de rire : il avait dû passer sur ses chaussures des couvre-pieds en plastique bleu et mettre sur la tête une sorte de bonnet charlotte, en cellophane également. Mon homme félin, mon styliste coquet, le père de l´enfant sur le point de naître avait sa face séductrice quelque peu altérée. Il était atteint du même fou rire que moi mais se défendait : “bon, je te rappelle que toi aussi tu as ce bonnet affreux sur la tête”.

Je me souviens qu´en réalité j´étais impressionnée : jusqu´au dernier moment, David avait dit qu´il ne viendrait pas en salle d´accouchement, que tout ce sang, mon corps écartelé, cette poussée finale, très peu pour lui. Il avait donc changé d´avis. J´étais étonnée. Etonnée mais heureuse qu´il soit là, tout émoustillé par l´événement, avec ce sourire qui illumine son visage et tout ce qui l´entoure.

Je me souviens qu´il fallait passer aux choses sérieuses et que la sage femme m´avait ausculté de nouveau puis avait dit : “c´est super, ça a marché, le bébé est maintenant exactement dans la bonne position. On va pousser maintenant”.

Je me souviens avoir bien aimé cette solidarité du “on”.

Je me souviens que lorsque je me suis mis à pousser sur les consignes de toutes ces personnes qui s´agitaient autour de moi (ils étaient peut-être 4, 5 ou plus), j´ai pensé : “ouh là là mais je me suis préparée à tout sauf à ça, comment on pousse ?”. Ça n´a rien de confortable ni de naturel de pousser en ayant les jambes relevées et le corps à l´horizontale. Et encore moins quand tout le monde regarde et semble assister à une compétition sportive.

Je me souviens de l´effort que ça me demandait et des remarques ensuite de la sage femme : “bien, ça va, maintenant on va faire une pause.”

Je me souviens avoir pensé, à chaque fois que le cas s´est répété : “mais le bébé, là, il est où? il fait quoi ?”

Je me souviens que les infirmières et la sage femme demandaient quel était le prénom choisi pour le bébé et que David en profitait pour se moquer de moi “Ah non non non, ça c´est pas possible de le savoir en France. Avant la naissance, on ne dit rien !”

Je me souviens que le gynécologue, après avoir vanté les courbes, s´extasiait maintenant sur mon périnée : “Excellent, parfait, idéal !”

Je me souviens avoir réalisé, d´un coup, qu´en lieu et place du bonnet-charlotte que tout le monde devait porter dans cette salle, lui était coiffé d´une petite toque rouge avec des poupées chinoises dessinées dessus. Il était original cet homme. Je me souvenais de l´échographie passée avec lui un peu plus d´un mois avant ; il écoutait de la musique pop-rock et chantait par-dessus en dodelinant de la tête tout en me passant son appareil sur le ventre recouvert de gel glacé. Quand David lui avait demandé si le bébé était bien une fille, il riait et s´exclamait, en désignant la preuve (on ne reconnaissait évidemment rien) : “Por supuesto que si que es niña, es escandalosamente niña !” (="Bien-sûr que c´est une fille, c´est scandaleusement une fille !"). Et il nous avait remis deux petites photos où il avait tracé une flèche et entouré au bic l´image de "la preuve".

Je me souviens regarder la pendule en face de moi mais sans en retenir l´heure (5h45, 6 h ? ou déjà plus ? ). Je ne me souviens plus du tout si cette dernière partie a été longue ou brève, David me soutient que je n´ai poussé que 3 ou 4 fois. Moi j´ai eu l´impression que ça durait plus, avec ces pauses qui me déroutaient où je me demandais où se trouvait le bébé.

Je me souviens que le gynécologue a proposé à David de venir voir mais que celui-ci est revenu bien vite à côté de moi en disant “Non non, ça va, je préfère rester comme ça, ici, à côté d´elle”. Il avait aperçu la tête, les cheveux mais ne voulait pas trop en voir. Comme moi, il attendait que l´enfant soit tout-à-fait sorti et préférait que le reste garde sa dimension magique.

Je me souviens d´une poussée où j´entendis soudain une des infirmières crier : “Parto ! Parto !”(= "Accouchement ! Accouchement !") comme si un avion allait décoller au beau milieu de la salle, et tous les autres membres de l´équipe se retourner, s´activer, concentrés et prêts, aux gestes rôdés et sûrs.

C´était là, maintenant, on allait décoller, en effet.

Je me souviens l´irréalité du moment où je sentis et je vis une petite boule de feu qu´on me posait sur le ventre, un peu rouge un peu violette et ne pas savoir par où la prendre, où commençait la tête, où était le pied.

Je ne me souviens plus du tout s´il y eut tout-de-suite un cri. Je ne crois pas car tout m´avait semblé surnaturel. Mais par contre, ça bougeait dans tous les sens, les jambes pédalaient frénétiquement déjà . J´ai pris cette boule de feu, ce météorite magnifique dans mes bras, je l´ai senti, humé, j´avais presque peur qu´il glisse ou ne m´échappe. Je n´en revenais pas. Solenn était là.


Je me souviens de l´immense paix soudain.



Je me souviens de la joie indicible, de la sérénité profonde. L´impression qu´il n´y avait plus de bruit, plus de temps. Juste une évidence, la respiration, la vie.

Je me souviens de David ne lâchant pas d´une semelle notre petite enfant lorsque la sage femme la prit pour lui donner les premiers soins, son regard au-dessus d´elle, ses yeux gourmands la dévorant, son sourire aimant, curieux. Cette fois, Solenn – et nous pouvions dire son prénom à tous – criait et la sage femme disait : “elle a d´excellents poumons cette petite !”. David lui demandait “tous les bébés ne font pas comme ça ?” et la sage femme riait “ah pas tous aussi fort en tout cas !”. J´avais la tête tournée vers eux, je me sentais profondément calme, immensément bien. Une infirmière ou une sage-femme finissait toutes les opérations qui se font dans ces cas là en me passant de l´eau chaude. J´avais vu des choses étonnantes juste avant, des aiguilles et un fil, le petit coussin de placenta qu´on sortait et lançait dans un seau et cette eau chaude effaçait tout, lavait tout. Je me sentais en Inde. Je pensais aux femmes qui font un massage ayurvédique au bébé dès qu´il naît. L´infirmière avait sa théière dans la main, c´était un peu décalé et touchant. Après toutes ces épreuves, la sensation était délicieuse. Comme quand on rentre d´une ballade sous l´orage, qu´on prend un bain, qu´on se sèche et qu´on prend un chocolat chaud devant un feu de cheminée. Je la regardais en souriant et lui disais : “vous avez un métier assez émouvant quand-même” et elle acquiescait : “oui c´est un très beau métier, surtout quand tout se passe bien comme cette nuit”.


Je me souviens qu´on me remit Solenn contre le corps et qu´elle se mit à chercher le sein pour téter, les yeux fermés. Petit minois tout plissé, un peu rouge encore, un peu griffé par endroits, chaud et doux. Une autre infirmière arriva, très dynamique pour cette aube naissante, qui me projetait d´un coup dans le monde des femmes ayant donné la vie (j´étais la "mami", la maman et plus personne d´autre) et qui se penchait vers le bébé, stimulait sa petite bouche pour qu´elle prenne le sein. Solenn s´y réfugiait mais avait aussi très sommeil après cette nuit mouvementée. Je caressais son talon, son coude, son genou, en essayant de reconnaître ces parties rondes et dures que je sentais en moi, quelques heures avant encore et qui faisaient danser mon ventre.


Il était 6 heures 24 ou 6 heures 26 quand Solenn est née ce matin-là. Le soleil se levait, magnifique, sur la mer face à l´hôpital.


Notre soleil était né.



Depuis, un an a passé. Bon anniversaire Solenn.





Notes du texte
:


* jeu de mot avec l´espagnol ou le catalan : "estar embarassada" signifie : être enceinte. Peu de temps avant mon accouchement, un de mes étudiants m´écrivait : "j´espère te revoir avec ton ventre. Comment ça va ton
embaras ?"


* célèbre clinique barcelonaise de haute qualité mais très onéreuse quand on n´a pas de mutuelle.

lundi 26 octobre 2009

Ca swingue hindou al Bruc !

J´ai trouvé la première expérience si amusante que je recommence ! Et pourtant je ne suis pas très contente de mes mini-vidéos, Solenn étant toujours plus amusante et surprenante en vrai ! A voir si je la surprend enfin en plein discours japonais...
Quoi qu´il en soit, dans cet extrait :
- Dans le rôle de la danseuse-4 patteuses : Solenn !
- Dans le rôle de la filmeuse-fredonneuse : la maman !
- Dans le rôle de la "voix-off" qui entre et attire notre petite gigoteuse : Carmen ! (nounou du Paraguay, voisine et remplaçante de David en cuisine les jours de flemme...)

La coccinelle qui promenait les chaises...

Je fais un essai pour savoir si ça marche...je veux dire de mettre une vidéo et au lieu d´en parler, de montrer le phénomène...

jeudi 15 octobre 2009

Incipit : chose promise, chose due !

Pour vous prouver que tout ne tourne pas (seulement) autour de la petite-reine-Soleil, voici un texte ! (un début de texte pour être plus précise) : ça en réalité, c´est un projet d´écriture plus long qui traîne dans les tiroirs (virtuels) ; je triche donc un peu car je l´avais déjà en réserve et cela reporte la réécriture (plus que recopiage) des écrits plus récents.

Je vous propose un petit jeu :
- vous n´écrivez aucun commentaire : j´arrête.
- Vous me dites que c´est nul : j´arrête.
- Vous me dites que ce n´est pas si mal : je continue.


Seule à la terrasse d´un café, Sol compte les heures, depuis son retour.

Deux hommes tournent dans la rue Tiquetonne, elle fredonne en tournant sa cuiller dans la tasse noire “Quiquetonne, tic tac toc, qui t´a quitté madonne ?”, puis se demande pourquoi Tiquetonne à présent et non plus Quiquetonne ?

On ne les voit plus, ils étaient minces, grands et sombres : Sol pose sa cuiller, murmure encore le nom énigmatique “Qui que...tonne ?”, pense à sa soeur, à Paris, aux hommes, “morts ou vifs” se précise t´elle.


Luz est dans l´atelier du peintre, sous les toits d´un immeuble très parisien, rue du Cherche-midi. Elle pose comme un chat au soleil, étalant langoureusement sa paresse sur le vieux canapé et ne pense à rien. Elle entend le peintre clamer qu´il n´a aucun respect pour la peinture. Elle joue avec la lumière, sur ses cheveux, sur sa peau, l´ombre, la lumière, la voix du peintre. “Non, c´est vrai, je n´ai aucun respect pour la peinture !”, insiste t-il. La voix se fait lointaine à mesure que les ombres chinoises dessinées par les doigts de Luz deviennent la seule perception tangible. Elle pense alors à sa soeur puis à Istvan, elle oublie le peintre et la peinture, et sombre d´un seul coup dans un sommeil délicieusement félin.

Sol tourne machinalement sa cuiller dans la troisième tasse de café qu´elle vient de commander, elle tourne sans y penser et sans raison puisqu´elle ne sucre jamais le café. Elle se penche au-dessus du breuvage et respire profondément. Cette odeur de grains torréfiés, dans ce petit café parisien un matin de juin, la terrasse de bonheur. Enivrée, elle relève la tête et la fait tomber en arrière, lâchant un soupir d´extase. Un mouvement, une conversation qui s´interrompt, un râclement de gorge, lui parviennent et lui font comprendre sans détour qu´on la regarde. Ses voisins de table, un couple âgé sentant la bergamote. Elle se tourne vers eux et leur lâche aussi naturellement que s´ils venaient de lui poser une question :

- Cela fait un an que je n´ai pas bu de café.

La vieille femme en redingote vert bouteille cède un sourire bienveillant. Son mari se contente d´un hochement de tête, comme si Sol était un petit animal exotique à côté d´eux, une distraction de bon augure pour ce début de journée. Pour se donner une contenance, Sol se remet à observer la rue Tiquetonne où elle ne voit plus qu´indistinctement des pantalons à pinces gris, des tailleurs noirs, des costumes encore bien sombres pour la saison. “Ces gens qui travaillent…” pense t´elle et cette idée l´assombrit car elle se demande que faire d´elle-même pour les mois à venir. Pour peu, elle en serait énervée, à moins que ce ne soit tout ce café.

- J´appellerai cette toile ratée “la Belle endormie”, il y en a des milliers des belles
endormies, alors non seulement c´est raté mais en plus cela n´a rien d´original...Vous vous en fichez n´est-ce-pas Luz ? Je n´ai pas de respect pour la peinture mais vous, vous n´avez pas de respect pour les peintres, non ?

- Vous voulez que je pose ou que je vous fasse la conversation ?

- Oui vous avez raison, vous pouvez tout aussi bien être muette. Vous pourriez quand-même poser éveillée, vous n´aviez pas les yeux fermés sur ma toile...Bon mais votre insolence est éloquente et c´est votre mystère que je veux capter après tout. Vous pouvez rester ici faire votre sieste, moi je vais peindre dehors. Des arbres, des branches ou des toits...de vraies choses inanimées car votre respiration me trouble.

La voix roulante continue de résonner dans l´atelier tandis que Luz fait des efforts au-dessus de ses moyens pour s´extirper de sa somnolence. Elle se lève et enfile sa robe avec sa nonchalance habituelle. Elle dit en baîllant, presque machinalement :

- Les toits d´accord, mais les arbres c´est animé. Et d´ailleurs, les toits ou les « toi » ? Bon, je m´en fiche en fait, je ne reste pas, votre canapé est tout défoncé et ma soeur est certainement déjà arrivée.

- Vous avez une soeur ? Vous ne m´avez jamais parlé de votre soeur... Vous ne parlez pas beaucoup, ce doit être pour cela. Elle était partie ?

Luz acquièsce d´un mouvement de tête.

- Mais elle n´avait pas précisé l´heure de son retour car elle déteste les retrouvailles dans les aéroports ou les gares. Le jeu est donc de la retrouver dans l´un de nos lieux fétiches.

- Ah, les soeurs, ça a toujours de drôles de jeux. La mienne, la dernière fois qu´elle m´a donné rendez-vous, elle m´a dit « C´est la dernière fois qu´on se voit, je ne veux plus entendre parler de toi ! ». C´était à cause d´une sombre histoire de sous bien-sûr. Eh bien, elle ne croyait pas si bien dire, en venant elle a eu une crise cardiaque et le rendez-vous a donc été déplacé au cimetière des Batignolles. Depuis, je ne l´ai effectivement plus revue...

- C´est affreux votre histoire. Et vous êtes affreusement cynique en plus.

- Affreux affreux, c´est le seul compliment que vous me faites à chaque fois que vous me voyez...Bien, belle insolente, allez retrouver votre soeur farouche à qui il n´arrivera pas ce type de mésaventures – croyez moi, je suis un peu chamane -et sortons ensemble si vous le voulez bien.

La porte claque d´un bruit sec derrière eux. La rue brille sous le soleil zénithal et a un air de vacances. Luz cherche l´heure sur le néon vert de la pharmacie : « midi ». Elle se dit : « magique, cette rue du Cherche-midi » et sourit. Elle joue à s´aveugler en offrant son visage aux rayons, elle plisse les yeux, puis les ferme, puis oublie l´heure qu´il est, où elle est. Quand elle les rouvre, elle aperçoit le peintre déjà loin qui lui fait un signe d´adieu de la main puis elle reconnait un autre homme qui tourne à l´angle de la rue... Elle veut l´appeler mais il disparait avant que le son de sa voix ne puisse prononcer son nom.

Il était mince, grand et sombre.

Magyar.

mardi 13 octobre 2009

Jour de fête sous l´oeil de Sergi Bernal

Il n´y a pas photo, ou plutôt SI, il y a photo entre nos petites images amateurs et celles d´un passionné de photographie qui rafle régulièrement les prix de divers concours. Sergi est le compagnon d´Eli et le papa d´Ariadna et ne se ballade jamais sans son appareil photo (dont je n´ai pas retenu la marque, même si je sais qu´ici ça aurait fait classe de le mentionner).
il vient de m´envoyer ces trois belles images du jour de fête que je décris dans l´article précédent : Jesus devenant le parrain spirituel de Solenn.

Bien entendu, Sergi étant derrière son objectif, il n´est pas sur ces photos. Il suffit de faire un petit jeu de "cherchez la différence" entre le dernier cliché du groupe dans cet article et celui que j´ai mis sur le précédent pour trouver Sergi (vous éviterez pendant cette opération de comparer la valeur esthétique des deux images pour m´épargner un complexe d´infériorité). Si vous apercevez un grand gaillard à l´allure de viking tenant dans sa main un bol tibétain, alors vous saurez qui est Sergi-le-majestueux.

Si vous avez la curiosité de connaître davantage le travail de ce garçon au reste fort sympathique, je pourrai vous passer l´adresse de sa page internet et il pourra même vous enregistrer dans son carnet d´adresses pour ses prochaines expos. Récemment il a exposé à Perpignan sa très belle série de photos de Chine. Il prépare actuellement un très beau travail sur les camps de réfugiés dans le sud de l´Algérie (où il s´est rendu l´an dernier).

Fréquemment, il revient de ses expos avec un prix sous le bras, en général des voyages qui font pâlir d´envie ses amis. Il part avec son sac à dos, en Inde ou au Guatemala et il fait de nouvelles photos, puis de nouvelles expos et alors il gagne de nouveaux prix et ainsi de suite...Quand la passion devient art de vivre, on peut croire aux dons du ciel, non ?


Sur ces photos :

1. Jesus et sa filleule, Solenn.
2. David, moi, Jesus et Solenn.
3. de gauche à droite : Eli et Ariadna (dans les bras), Rodrigo et Ingrid, David, moi et Solenn, Jesus, William et Luisi.

jeudi 8 octobre 2009

Jesus arriva


...et la lumière fut sur la petite tête de Soleil.

Un jour de mars ou avril, pendant la fête de la Terre qui se célébrait dans les jardins de la Ciutadella à Barcelone, j´avais demandé à Jesus s´il accepterait d´être le parrain spirituel (mais non confessionnel) de Solenn. Il en fut touché et prit très à coeur cette proposition qu´il accepta avec joie. En réalité, ça faisait longtemps que j´y pensais, avant même la naissance de Solenn et il faut que je raconte là qui est Jesus.

Je l´ai rencontré à travers Eli quand je revenais de Chine en 2006 et qu´elle s´apprêtait pour sa part à y repartir. Je cherchais à la fois une personne qui sache faire les massages ayurvédiques et un cours de yoga. Or, Jesus était aux dires de mon amie et colocataire Elisenda LA personne qu´il me fallait, répondant à mes deux attentes : il maîtrisait le massage indien à la perfection et donnait des cours, non de yoga mais de Kalaripayattu, un art martial du sud de l´Inde qui combine yoga, relaxation et figures martiales dans des enchaînements chaloupés. Je n´ai pas pu commencer par cela dans un premier temps car je travaillais au moment où il donnait ces séances mais j´ai découvert sa dextérité de masseur, la bonté infinie qui habitait ses mains et tout son être.
Etant ami également de Marta avec qui j´ai habité pendant l´absence d´Eli, nous avons commencé eu l´occasion de nous voir plus souvent et de mieux nous connaître pendant cette période. J´eus le temps d´observer alors son ascendance sur le petit Tiago et la tendresse qu´il lui manifestait. J´aimais ce qu´il disait de l´enfance et je le voyais émerveillé. Ceci m´est resté et a sans-doute joué dans mon envie d´en faire le parrain de notre fille. Puis je suis allée tester un de ces fameux cours au nom imprononçable et je me suis arrangée l´année suivante pour travailler le samedi matin et être à Barcelone le vendredi soir afin d´en faire une pratique hebdomadaire. Au début, j´étais tellement fascinée par sa propre façon de faire, la beauté de ses gestes (Jesus ne fait pas de yoga ou de Kalaripayattu, il danse, tournoie et s´envole littéralement sous les yeux ébahis de ses "disciples") que j´osais à peine esquisser un mouvement, de peur de paraitre gauche et totalement inesthétique après ses prestations majestueuses. Je cherchais toujours à me placer derrière lui, "dans son ombre" afin de me saoûler de sa grâce et de tenter d´imiter maladroitement ce qu´il faisait. Il faut également confesser que cet art martial est très physique et pas si facile à appréhender au début. Jesus a plusieurs cordes à son arc pacifique : il a étudié les sciences maritimes mais est devenu danseur puis, après s´être blessé au genou, il a appris les massages et le Kalari. Il travaille dans un hôpital de jour avec des personnes souffrant d´anorexie ou de boulimie (à travers un programme d´Art thérapie) et s´intéresse à diverses méthodes curatives alternatives. Il se forme aussi en constellation familiale et apprend la peinture et la sculpture dans une école d´art parallèle. A part tout ça et sans le savoir, c´est un ange tombé sur terre. Il ne pouvait y avoir de meilleur parrain pour Solenn.

Je ne vexerai personne j´espère en affirmant que c´est réellement
l´ami le plus spirituel que j´ai. Bien entendu n´étant ni croyants ni baptisée pour ma part, nous ne voulions pas de connotation chrétienne à cette cérémonie pour accueillir Jesus comme parrain dans la vie de Solenn. Nous l´avons d´ailleurs laissé choisir entièrement le déroulement et le contenu de cette petite fête que nous avons célébrée le 20 septembre. Auprès du cerisier, il avait disposé plusieurs objets représentant les cinq éléments : fruits, bois - encens rapporté de Colombie, bougie en forme de fleur de lotus, bouteille bleue sacrée ouvrant les shakras, fleurs... En tant que mère et femme constituée de yin, je devais porter la flamme pour équilibrer ma substance et y ajouter du yang. Et David, en tant qu´homme et père façonné de yang, prenait le petit récipient d´eau et versait cet élément yin sur les pieds de Solenn. Puis Jesus les lui a massés avec de l´huile de mandarine. Avant ce petit rite, il a demandé à tous de fermer les yeux et nous a guidés dans une méditation afin de nous réunir mentalement autour de cet acte symbolique dédié à l´enfant. Il va sans dire que Solenn, ainsi que son amie Ariadna - de 15 jours son aînée - n´en percevait les effets tranquillisants que de très loin et toutes deux mettaient une joyeuse ambiance, qui pour réclamer le sein, décortiquer le raisin et le goûter, ou manifester une forte envie de gambader. William, le compagnon de Luisi (avec qui je pratiquais le Kalaripayattu) accompagnait le tout musicalement en faisant résonner les bols tibétains. Ce fut une très belle après-midi. Eli et Sergi étaient là avec Ariadna, Luisi et William étaient venus avec Jesus et Ingrid et Rodrigo nous avaient rejoint.

Je retranscris ici "dans le texte" (c´est-à-dire en castillan) les mots que Jesus dédia à sa filleule

En este dia tan especial
mi niña dulce,
te quiero bautizar

como testigo este arbol regalar
tu madre orgullosa en tus meses de vida

cargados de dicha y felicidad

Envidia a tu padre le darás

porque el rocio de la mañana te quiere abrazar
pero contento, que presente siempre lo tendràs

Tu alma i mente

caminando hacia la libertad

y que los àngeles griten, Amen

Solenn te quieren llamar

Mi bendición, dulce niña,

Te quiero regalar


Pendant l´après-midi, Ingrid a confié à son père le désir d´être la marraine de sa petite soeur. A vrai dire, nous n´avions pas pensé particulièrement au double féminin du parrain, ne suivant aucune pratique traditionnelle et du coup nous n´avons pas fêté simultanément cet événement, mais nous avons bien-sûr accepté son offre. Je n´y aurais pas pensé car le lien de parenté me semblait amplement combler leur relation et ne donnait pas lieu à un autre rôle. Mais cela lui tenait tant à coeur qu´il eût été difficile de freiner cette envie et puis cela permet peut-être aussi de ne pas être qu´une "moitié" de soeur comme le dit bêtement notre langue mais au contraire une grande soeur complète...Et ce ne sera sans-doute pas le même type d´influence que Jesus mais Ingrid fera grandir Solenn dans la continuité de l´héritage artistique paternel, les pieds emmêlés dans les fils, les tissus et les bobines de laine...Alors, tissons encore une fois, reprenons ce refrain, le refrain des liens, afin que Solenn connaisse avant tout les soleils doux et ardents de l´amour ...qu´elle apprenne à aimer, sentir et confier, avec ces belles personnes autour d´elle qui veillent à son éveil...